Les bibliothèques sont, étymologie oblige, des lieux où l’on conserve principalement des livres manuscrits ou imprimés. La formidable collection patrimoniale de la Médiathèque Jacques-Chirac en atteste. Mais les aléas de l’histoire, locale et nationale, ont régulièrement permis l’introduction dans les fonds d’éléments plus inattendus, comme des objets.
Les objets conservés à la médiathèque proviennent quelquefois de dons ou de legs à l’ancienne Bibliothèque municipale de Troyes. Ainsi, quelques gravures et un tableau du 18e siècle entrent dans les collections vers 1882, légués par un ecclésiastique troyen, l’abbé Jean-Baptiste Coffinet (1810-1882). Secrétaire de l’évêché de 1834 à 1854, celui-ci est également historien et archéologue. Il collectionne de très nombreux objets et vestiges du patrimoine religieux local, notamment des manuscrits et des livres anciens dont il peut faire généreusement don à la bibliothèque.
À sa mort, il lègue à l’établissement les portraits des cinq derniers abbés de Clairvaux, dont celui de Louis-Marie Rocourt, « le [51ème] et dernier abbé de Clairvaux, décédé le 6 Avril 1824 à l’âge de 78 ans », comme l’indique fautivement la légende. Né à Reims en 1743, Dom Rocourt est élu à l’abbatiat par les moines, selon la Règle de saint Benoît, en 1784. Il quitte Clairvaux après sa fermeture au début de la Révolution et vit ensuite à Bar-sur-Aube. Il est ici représenté en habit ecclésiastique d’apparat, avec la croix et l’anneau du père abbé. Un ouvrage à la main et deux volumes en arrière-plan constituent vraisemblablement une allusion à la place essentielle du livre dans l’univers cistercien, matérialisée par la bibliothèque de l’abbaye, d’une richesse considérable à cette époque, avec quelque 50 000 volumes.
Ce portrait de Dom Rocourt, une huile sur toile de 90 x 71 cm d’un artiste resté inconnu, est présenté au public en 2015, dans le cadre de l’exposition « Clairvaux, l’aventure cistercienne ». C’est alors l’occasion d’une restauration, rendue nécessaire par le mauvais état de conservation du tableau. Aujourd’hui accroché dans la réserve précieuse de la médiathèque, il veille sur les manuscrits de Clairvaux, témoignant des derniers feux de l’abbaye, avant sa dissolution à la Révolution.
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