A l’occasion du cycle de conférences « Des Animaux et des Hommes », organisé en partenariat avec l’Institut Rachi de Troyes, les équipes du blog 11km de Patrimoine et de l’Institut Rachi vous proposent une série de billets sur les relations entre l’Homme et l’Animal à travers les documents anciens conservés à la Médiathèque de Troyes Champagne Métropole.
Les représentations iconographiques médiévales des évangélistes composent des visions prophétiques et des paroles des évangiles, en une image, sur le mode de l’analogie entre les animaux fantastiques des visions juives de la merkavah et les porteurs de bonne nouvelle dans le Nouveau testament.
Le Ms 960 est, en ce sens, fidèle à la tradition chrétienne. Ces hommes à tête d’animal font écho à la vision du prophète Ezéchiel (Ez.1:1-14), celle de quatre vivants (les hayyot, en hébreu) portant le char céleste (merkavah, en hébreu) et à l’Apocalypse de Jean où ces mêmes vivants (zoôn, en grec) profèrent, de jour comme de nuit, des paroles de vie (Ap. 4:6-11). Ce manuscrit carolingien ne représente que trois des quatre évangélistes : Luc à la figure de taureau rumine les paroles, Jean à figure d’aigle s’élève vers le ciel et Marc a pour figure… un cheval ! Etrange… Sa représentation habituelle est celle d’un lion. L’enlumineur était-il étourdi ? Ne savait-il pas à quoi ressemblait un lion ? Remonter les siècles et retrouver la trace du lieu où cet évangéliaire a été composé nous donneront peut-être des pistes.
909. La date du manuscrit est certifiée par le copiste en première page, ce qui est rare. Il a été fabriqué dans le scriptorium de l’abbaye de Landévennec avant le départ précipité des moines, fuyant les invasions vikings et nous en perdrons la trace pendant des siècles jusqu’au rachat, par le parlementaire bourguignon Etienne Bouhier, de la bibliothèque du poète Pontus de Tyard où figurait le manuscrit.
Où a-t-il résidé avant ? Comment a-t-il voyagé de l’abbaye Saint Gildas de Rhuys, sa première résidence – où d’ailleurs Abélard a fait un passage malheureux quelques siècles plus tard – à la bibliothèque d’un membre du cercle littéraire de la Pléiade, ami de Ronsard et de Du Bellay ? Nous ne le saurons bien sûr pas. Mais il connaîtra l’Abbaye de Clairvaux qui acquerra l’intégralité de la bibliothèque Bouhier peu avant la Révolution française, bibliothèque qui, pendant la Révolution, sera confisquée puis nationalisée et le manuscrit sera versé dans les fonds de la nouvelle bibliothèque municipale de Troyes. Est-ce la fin du voyage ? Pas tout à fait. 1100 ans après son départ de Bretagne, il fera un séjour à Douarnenez, à l’occasion de l’exposition « La Tombe viking de Groix » en 2013. Et le conservateur du Port-musée de Douarnez, Kelig-Yann Cotto, nous livre une indication intéressante sur la figuration de Marc : Marc’h signifie cheval, en breton. D’autres enluminures bretonnes attestent cette hypothèse, celles du « Groupe de Landévennec », où des manuscrits figurent Marc à tête de cheval. Cet évangéliaire carolingien n’a donc pas fini de nous faire voyager…
Magnifique et super idée, j’aimerais partager mais tous mes amis ne sont pas adeptes de Facebook c’est pourquoi je vous laisse mon adresse mail.
Merci pour le partage très intéressant et bravo !