Star montante de la médecine alternative au 18e siècle, l’homéopathie n’a eu cesse de connaître des détracteurs. En effet, trois siècles plus tard, la scission entre homéopathes et allopathes (médecine classique) perdure. Certains médecins accordant du crédit à la médecine homéopathique, tandis que d’autres se focalisent uniquement sur les remèdes traditionnels.
L’objectif de cet article n’est pas de déterminer si l’homéopathie est une pratique médicale efficace ou au contraire une « pseudoscience » mais de mettre en avant les débats qui ont existé entre médecins allopathes et médecins homéopathes depuis l’apparition de cette médecine non conventionnelle en 1796.
Dans le fonds que le médecin François Carteron (1789-1866) nous a légué, de nombreux ouvrages traitent de cette thématique, preuve qu’il s’agissait d’un vrai sujet de discussion au sein du corps médical à cette époque. Dans le livre Notices élémentaires sur l’homéopathie (1844) de Gottlieb Jahr, par exemple, l’homéopathie est considérée comme une pratique médicale à part entière. Plus douce, plus naturelle, moins risquée que la médecine traditionnelle, les arguments de l’auteur sont légion. Selon lui, l’efficacité de l’homéopathie dans la guérison de certains maux est avérée. Son argumentation incrimine plutôt les médecins connaissant mal l’homéopathie et qui prescrivent de mauvaises doses à leurs patients.
Parmi les plantes les plus efficaces, il cite la Belladone, la Camomille, l’Arnica. D’après lui, ces plantes, bien dosées, auraient de multiples vertus susceptibles de guérir des maux variés. La camomille serait un remède efficace en cas de surexcitation du système nerveux, de spasmes, d’ulcération de la peau ou de fièvre inflammatoire ; tandis que l’arnica serait capable de soigner toutes les lésions mécaniques et rhumatismales ; et la belladone serait la plante à utiliser en cas de troubles sanguins.
Mais l’existence de nombreux traités en faveur de l’utilisation de l’homéopathie dans la pratique médicale ne signifie pas pour autant que celle-ci était couramment utilisée par les médecins du 18e et 19e siècles. On trouve, en effet, de nombreux livres remettant en question la pertinence de cette pratique, voire la considérant comme un danger. Dans Les allopathes et les homéopathes devant le Sénat (1865) plusieurs discours de médecins prononcés au Sénat lors de la séance du 1er juillet 1865 sont retranscrits afin de déterminer la légalité de l’homéopathie dans la pratique médicale courante.
Dans cet ouvrage, le médecin allopathe M. Dumas confronte son point de vue à celui du médecin homéopathe M. Bonjean. Dès les premières pages, le médecin allopathe alerte les autorités politiques sur le possible mauvais emploi de l’homéopathie et préconise l’usage exclusif de la médecine traditionnelle déclarant que l’homéopathie constitue « une infraction complète de toutes les lois qui règlent la médecine » (p.12). Il va même jusqu’à citer l’ouvrage d’un autre médecin homéopathe afin de convaincre le sénat qu’il s’agit d’une pratique fantaisiste puisque les doses utilisées sont, celui lui, arbitraires et ne donnent aucun gage d’efficacité (voir ci-dessus p. 39-40). Il se montre toutefois ouvert à cette pratique sous réserve d’obtenir des preuves d’efficacité (p.46).
A contrario, le médecin homéopathe affirme, quant à lui, que l’homéopathie est aussi légale et officielle que l’allopathie et que rien n’interdit à un médecin de choisir entre différentes méthodes pour soigner ses patients étant donné que l’État ne régit aucun système médical et demande simplement aux médecins de disposer d’un diplôme légal (p.62).
Sa thèse est d’ailleurs accréditée par le député André Marie Jean Jacques Dupin qui concède le fait que L’État ne doit patronner aucun système scientifique et qu’il n’existe pas de « médecine officielle » (p. 107). Cependant, il n’existe qu’une seule médecine selon lui. L’homéopathie proposant des traitements alternatifs aux remèdes traditionnels sans pour autant qu’il s’agisse d’une discipline scientifique à part ou de « médecine auxiliaire »., mais plutôt d’un enrichissement de la médecine susceptible de faire avancer la connaissance.
De nos jours, l’homéopathie fait toujours partie intégrante de la médecine traditionnelle, certains laboratoires comme les laboratoires pharmaceutiques Boiron proposent des remèdes homéopathiques à la vente et certains généralistes se présentent à la fois comme médecin et homéopathe en toute légalité. Ce qui n’empêche pas le débat de se poursuivre puisque depuis 2021 la Haute autorité de santé a fait le choix du déremboursement de l’homéopathie sans pour autant en interdire l’usage (voir lien ci-joint : https://www.gouvernement.fr/actualite/deremboursement-des-medicaments-homeopathiques).
Une petite caricature pour finir…
0 commentaires