Activité de loisir par excellence, la pratique de la pêche à la ligne a longtemps été réservée aux classes aristocratiques et bourgeoises. Jusqu’à la fin du 19e siècle, les classes populaires pratiquent quant à elles une pêche de subsistance dite « aux engins », à partir de filets, casiers ou pièges.
Dans le contexte de la loi du 13 juillet 1906, qui impose définitivement le repos dominical, la pêche à la ligne se démocratise et devient un loisir populaire.
Une littérature se développe autour des différentes techniques, appâts et espèces de poissons, permettant aux pêcheurs une connaissance plus fine des pratiques et des milieux aquatiques.
A Troyes, la présence de la Seine et de ses nombreux bras, rus, canaux, digues et déversoirs, ménage aux pêcheurs quantités de coins de pêche. Le réseau d’eau s’étend à environ 13km à l’échelle de l’agglomération. On y pêche notamment le brochet, le goujon, la perche, le sandre ou la carpe.
Loisir solitaire mais aussi pratique de sociabilité, les parties de pêche sont souvent l’occasion de créer du lien, à petite ou grande échelle.
La Société Amicale des Pêcheurs à la ligne troyens voit le jour en 1891, et compte 1400 membres en 1907. Elle organise plusieurs concours de pêche qui connaissent un très gros succès et voient se côtoyer les classes bourgeoises et ouvrières.
Le dimanche 17 juin 1906, à l’occasion de l’ouverture de la saison de pêche, un premier concours est organisé sur le canal de la Haute Seine, entre l’écluse du boulevard Danton et le pont de Chalons. Les dames qui prennent part à la compétition se voient réservés les abords du pont Largentier, réputé plus poissonneux… Grand rassemblement populaire, le concours donne lieu à un défilé dans les rues de la cité. L’événement réunit 1700 pêcheurs, et près de 15000 spectateurs. Le Petit Troyen rapporte le lendemain que près de 25kg de poisson a été pêché à l’occasion.
L’année suivante, le dimanche 26 mai 1907, le concours se déroule à la ballastière de Clérey. Pour l’occasion, des trains spéciaux assurent le transport entre Troyes et la gare de Saint-Thibault ; et nombreux sont ceux qui font le trajet à bicyclette ou à pied. Le concours a lieu le matin, suivi par une grande fête champêtre, avec baraques foraines, guinguettes, carrousels et jeux d’eau, ainsi qu’un bal sur la pelouse, animé par la fanfare de l’Union ouvrière de Sainte-Savine.
Un nouveau concours de pêche a lieu le dimanche 12 septembre 1909, à l’occasion des premières Fêtes de la bonneterie. Organisé par le journal Le Petit Troyen sur les rives du canal de la Haute Seine, il se tient à la tombée du jour, à la lumière des lanternes vénitiennes distribuées aux concurrents. Aucun témoignage iconographique ne figure dans nos collections, mais le journal rapporte que l’événement a réunit environ 300 pêcheurs. Accompagné par un concert de la fanfare de Saint-Julien, installée sur un gigantesque cygne illuminé par 500 verres blancs, il se clôture par un embrasement du canal.
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