Un jardin de fleurs

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Par Caroline Maire | Le 30 mai 2024 | Imprimés

Comme chaque année en juin les médiathèques de Troyes se mettent au vert avec l’opération « Mon Jardin rêvé ». C’est l’occasion pour nous de vous présenter une référence en matière de jardinage au 17e siècle : l’Hortus floridus.

L’Europe du 17e siècle se passionne pour les jardins. C’est la grande époque des voyages scientifiques dans les contrées lointaines, d’où l’on rapporte des variétés de plantes rares ou inconnues en provenance de Méditerranée, d’Amérique, d’Extrême-Orient ou des îles du Pacifique. La tulipe récemment importée de Constantinople suscite en Hollande et dans toute l’Europe un engouement sans précédent. Les jardins de demeures princières rivalisent de créativité et instaurent une esthétique nouvelle.

Le dessin botanique détaille désormais les plantes dans leurs moindres spécificités, et les imprimeurs s’appuient sur les dernières innovations techniques en matière de reproduction d’images pour diffuser les connaissances de cette science naissante à des amateurs de plus en plus nombreux.

C’est dans ce contexte que paraît en 1614 la première édition de l’Hortus floridus.

Son auteur, Crispin de Passe le Jeune est dessinateur et graveur dans la ville d’Utrecht, aux Pays-Bas. Aidé de son père et de son frère, eux-mêmes dessinateurs et graveurs, il conçoit et réalise ce florilège qui constitue à la fois un manuel de jardinage et un catalogue de plantes, principalement à bulbes.

La page de titre rend hommage à deux botanistes de renom, considérés comme les pères de la botanique et de l’horticulture : Rembert Dodoens et Charles de l’Ecluse, dont les portraits apparaissent dans deux médaillons, encadrés par les allégories du vent, du soleil et de la lune.

L’ouvrage connaît immédiatement le succès et devient très recherché par les amateurs de jardins. Il est rapidement suivi d’éditions en français, anglais et néerlandais. Mais sa genèse est particulièrement difficile à reconstituer. Il semble en effet que les différentes planches et parties du livre aient été imprimées séparément, dans des lieux et à des dates spécifiques, puis assemblées de différentes façons. Chaque exemplaire de l‘Hortus floridus est donc plus ou moins unique.

L’édition conservée à la médiathèque est ainsi composée de quatre parties distinctes et comporte 186 planches gravées sur cuivre. Issue du fonds Bouhier, de format oblong très inhabituel, elle est malheureusement privée de certaines planches et déchirée en de nombreux endroits.

La première partie montre des fleurs classées, non par espèces mais par saison de floraison. Chaque saison s’ouvre sur la représentation d’un jardin privé typique du 17e siècle. La morphologie végétale de chaque plante y est représentée de manière très fine, grâce à l’utilisation de la technique de gravure sur cuivre. Les plantes sont dessinées entières, avec leur bulbe, et souvent accompagnées d’insectes. Leur nom figure dans différentes langues : latin, italien, français, allemand, parfois anglais.

Une deuxième partie est consacrée à « l’autre partie du jardin » qui, « outre les fleurs, abrite également différents types d’arbres fruitiers, d’arbustes, de plantes et d’herbes médicinales ».

Ces deux premières parties en latin sont suivies de deux parties en français. Un Traité compendieux et abrégé des tulipes, imprimé à Paris en 1617 chez Melchior Tavernier, détaille les différentes variétés et leurs méthodes de culture. Chaque tulipe est ici présentée avec le nom de son obtenteur.

Ultime originalité, ce recueil imprimé en noir et blanc contient une série d’instructions « au service de tous les curieux amoureux des fleurs », invitant le lecteur non seulement à se représenter plus précisément les plantes, mais aussi à les mettre en couleur, et faisant de l’ouvrage un livre de coloriage avant l’heure.

Certaines bibliothèques à travers le monde conservent ainsi des planches détachées du livre, ou vendues séparément, et colorisées par des artistes plus ou moins anonymes.

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